Premier Trek post séisme au Langtang, un bilan très positif

Avant de partir, les conversations que j'ai pu avoir avec plusieurs guides travaillant au Népal (Français ou Népalais) se résumaient toujours ainsi : «Tu vas dans la vallée avec un groupe ? Mais c'est fermé, le gouvernement ne délivre pas de permis, vous ne trouverez pas de jeeps pour aller à Syabru à cause du blocus pétrolier, le chemin est très difficile et il n'y a plus rien à voir. » Bref, les rumeurs allaient bon train.

 

Il en fallait plus pour me décourager d'autant plus que je disposais d'informations fiables en provenance de mes amis Langtangpas qui m'indiquaient tout le contraire.

Aucun soucis donc pour obtenir les permis, pas plus de problèmes sur le trajet en jeep jusqu'à Syabru Besi, à peine 5 heures, la circulation étant très fluide en raison de la pénurie de carburant. A Syabru la reconstruction bat son plein, des bâtiments sont intacts, d'autres en chantier. Les petits lodges les plus pauvres et les plus abimés sont encore très délabrés. La bourgade qui était déjà en pleine mutation avant le tremblement de terre en raison de la nouvelle Highway est toujours aussi animée. L'ambiance est festive, nous arrivons le jour de la Laxmi Puja, une fête importante dans les célébrations de Tihar. Bonne humeur, friandises, lampions, chants et spectacle de danses, un accueil inespéré.

 

Nous sommes 15 à partir pour la vallée du Langtang.

Du côté de l'équipe locale : Sandu Chusang (guide Langtangpa) et 7 langtangpas. Aucun d'entre eux n'est porteur professionnel, ils sont éleveurs, anciens propriétaires de petits lodges, cette fois même le grand lama de la vallée a souhaité se joindre à nous. Certains sont déjà venu travailler avec moi, pour d'autres c'est la première fois, mais je les connais tous et je sais quelle épreuve ils sont en train de traverser. Tous ont perdu un enfant, un conjoint, un parent, leurs maisons sont rasées, tous sont des survivants qui ont échappé de justesse à la mort, quelques uns ont été blessés. Et pourtant ils sont là, toujours aussi accueillants, humbles et souriants prêts à se mettre au boulot et à tout faire pour que le groupe vive un séjour réussi. C'est pour eux, mais aussi grâce à eux que j'ai organisé ce trek le plus vite possible, une équipe forte et soudée sur qui je peux compter quoi qu'il arrive.

Du côté des trekkeurs : Stan 48 ans vient de Paris, fan de voyage et de montagne. Xavier 48 ans, région parisienne, amoureux du Langtang, c 'est son second voyage avec La Trace du Yak. Marie Laure 62 ans, médecin dans le Vercors, c'est son premier voyage au Népal. Françine 62 ans, elle a voyagé au Népal il y a 33 ans.

Johanna, une jeune journaliste et anthropologue allemande, ainsi qu'un photographe Népalais nous accompagnent.

Le sentier en balcon vers Sherpagaon!
Le sentier en balcon vers Sherpagaon!

 Première partie du chemin tranquille jusq'à Sherpagaon en passant par Kangjim. Il y a du monde dans les villages, beaucoup de maisons traditionnelles sont déjà reconstruites et même 2 ou 3 très gros lodges ! Nous croisons quelques trekkeurs qui marchent sur le Tamang trail. La nouvelle route (piste) arrive presque jusqu'à Kangjim. L'équipe se met en jambe, on sent chez tout le monde une certaine appréhension face à ce que nous allons trouver plus haut, mais chacun reste positif.


Deuxième étape jusqu'à Goda Tabella. Le chemin en balcon, bien touché par les glissement de terrain a été totalement repris et déroule sans problème jusqu'à Rimche. Le paysage est toujours magnifique. En arrivant dans la vallée on découvre les premiers gros dégats, Lama hotel est totalement déserté. On passe rapidement pour retrouver la sérénité des grands arbres de la forêt. Gumnachowk a été détruit par des chutes de pierre lors du 2ème séisme. Chunama est en revanche relativement épargné. Les parties en bois du Lodge ont bien résisté, les murs en pierre ont bougé mais il faudrait peu de temps pour remettre l'endroit en état.

Le chemin passe ensuite un gros éboulement sans difficultés avant de se redresser franchement sur une centaine de mètres. Un passage non exposé ou il faut s'aider d'un tronc d'arbre, le reste sans problème. Pour éviter ce passage qui risque de demeurer instable longtemps les Langtangpas ont décidé de faire passer le chemin de l'autre côté de la vallée et un pont est en cours de construction.

Camp à Goda Tabella chez les militaires qui ont abandonné leurs quartiers. On peut donc passer confortablement la soirée autour d'un poêle surchauffé. Heureusement car les nuits sont fraîches, quelques degrés en dessous de 0.

bon sentier dans l'éboulis peu avant Goda Tabella
bon sentier dans l'éboulis peu avant Goda Tabella

 Troisième jour, acclimatation autour de Goda Tabella. Une dizaine de villageois (dont le papa de Sandu) sont installés dans un Karka à 5 minutes du camp militaire, ils s'occupent de leur bêtes. Nous leur rendons une visite matinale, pour assister à la traite des dzomos,à la fabrication du beurre et déjeuner d'un grand bol de succulent fromage frais. Les voyageurs découvrent, ravis, l'acceuil des Langtangpa. Ballade jusqu'à Chyamki, les hameaux sont totalement détruits par les avalanches. En chemin Sandu nous montre les terrains à Tangshyap où la reconstruction d'une partie des maisons est envisagée. L'endroit semble effectivement propice à l'installation d'un nouveau village.

Soirée chaleureuse au coin du poêle après une nouvelle visite chez les éleveurs, une bonne partie d'entre eux sont venus manger avec nous. L'atmosphère est détendue et conviviale, les Langtangpas sont heureux de voir des trekkeurs revenir et les trekkeurs heureux de partager cette bonne soirée avec eux.


Dorje bat le beurre
Dorje bat le beurre
Chuuki prépare le thé au lait
Chuuki prépare le thé au lait

 Quatrième jour : Comme on peut se l'imaginer facilement la traversée de Gumba et de l'éboulement massif qui a ravagé Langtang est éprouvante pour tout le monde (même si le chemin tracé dans les éboulis ne présente aucun difficulté) mais chacun reste fort et essaie de contenir son émotion jusqu'au camp de nos amis d'OM Nepal, (ils ont commencé à déblayer quelques débris et à construire un abri temporaire) où on se fait payer un thé réconfortant. Pour la suite du chemin, bonne surprise, la plupart des nombreux murs mani (pierres gravées) ont été remontés à la grande joie des voyageurs qui peuvent découvrir cet aspect important de la culture Bouddhiste tibétaine. Les lodges de Mundu sont totalement détruits mais pas le vieux village, relativement épargné, les travaux de reconstruction sont bien avancés et une trentaine d'habitants sont revenus y vivre. L'hospitalité Langtangpa n'a rien perdu de sa vitalité et nous passons la journée et la soirée en famille à déguster des plats Tibétains dans une belle maison traditionnelle. Des beaux moments d’échanges.

Murs manis et le Kangchengpo après Langtang
Murs manis et le Kangchengpo après Langtang
Petit dèj en famille à Mundu
Petit dèj en famille à Mundu

Cinquième jour : Petite visite chez le lama et ses 2 nones pour faire bénir les drapeaux à prière que nous allons monter au Tserko Ri, puis installation du camp à Kyanjin sur le terrain de Sandu à l'écart de la cuvette du village et avec vue sur les montagnes. Plutôt confortable avec la petite maisonnette attenante qui permet de se caler au chaud. Il y a un peu de monde à Kyanjin, plusieurs gros lodges sont en reconstruction, la bakery est terminée. Je retrouve quelques amis, anciens porteurs, avec qui je suis heureux de partager un tchang ou un thé. La visite d'un groupe les motive à travailler avant l'arrivée de la neige pour pouvoir proposer quelques services touristiques à la prochaine saison. Balade au glacier dans l'après midi.

Le joli sourire des nonnes
Le joli sourire des nonnes
Le coucher de soleil vu depuis notre camp à Kyanjin gompa
Le coucher de soleil vu depuis notre camp à Kyanjin gompa

Sixième jour : Très belle ascension du Tserko-Ri, le chemin n'a pas été touché. Au sommet on redresse les mats en bois pour y accrocher 5 darchos (les grands drapeaux à prière verticaux), une couleur pour chaque élément. Nos 3 lamas pratiquent une longue et magnifique Puja et nous nous joignons à eux pour le final où chacun lance des poignées de Tsampa dans le vent en criant le fameux « kiki soso Laaa Gyalooooo » (les démons sont vaincus, les dieux sont vainqueurs). De grands moments dans un paysage de rêve.

Gyurme et Stan arrivent au sommet du Tserko-ri
Gyurme et Stan arrivent au sommet du Tserko-ri
Hissage des Tarchos au Tserko-ri
Hissage des Tarchos au Tserko-ri

Septième jour : Balade aux lacs puis au camp de base du Naya Kanga, le point de vue sur la haute vallée est spectaculaire, ça donne envie de monter. Ca tombe bien c'est notre objectif pour les jours suivants. En redescendant on passe au Gompa, très touché par l'avalanche mais où il reste de belles statues et de vieilles peintures. Les habitants de Kyanjin continuent à y pratiquer leur puja et à faire des offrandes.

Le Tserko-ri et la haute vallée vus depuis le Naya Kanga base camp
Le Tserko-ri et la haute vallée vus depuis le Naya Kanga base camp
autel dans le gompa en ruine de Kyanjin
autel dans le gompa en ruine de Kyanjin

Jours 8/9/10 : 3 journées superbes dans la haute vallée, temps magnifique paysages époustouflants, ambiance excellente et soirées chaleureuses dans les karkas de Numtang et de Langshisha. L'équipe Langtangpa est vraiment au top et tous sont heureux de partager ces moments magiques au cœur des montagnes. Nous poussons jusqu'à la source de la Langtang, une très belle grotte de glace à cette époque de l'année.

départ pour les karkas de la haute vallée, avec 2 chevaux en renfort pour le matériel
départ pour les karkas de la haute vallée, avec 2 chevaux en renfort pour le matériel
Sandu et Xav aux sources de la Langtang
Sandu et Xav aux sources de la Langtang

Jours 11/12/: première étape de retour jusqu'à Chunama, le petit lodge au milieu de la clairière. En une petite heure de ménage frénétique, le dining et la cuisine retrouvent leur charme et les chambres sont utilisables. Sur tous les visages ont peut lire la joie de voir ce lieu, abandonné depuis le séisme, reprendre vie. A Lama hotel des travaux sont en cours pour reconstruire un lodge et à Rimche l'un des 2 lodge a réouvert. Nous croisons plusieurs groupes de Langtangpas qui remontent pour commencer à déblayer les débris de leur maison avant l'arrivée de la neige. La vie reprend petit à petit et la vallée est loin d'être abandonnée comme le disent les rumeurs. Nous passons ensuite à Kangjim puis à Bridhim où nous dormons. Là aussi la reconstruction à bien commencé. La situation des villages construits sur les balcons (en dehors de la vallée proprement dite) est très différente du Langtang. Il y a eu très peu de morts, les habitants vivent dans leurs villages et la reconstruction va bon train. En revanche les gompas sont très abimés.

L'équipe au complet avant le départ de Chunama
L'équipe au complet avant le départ de Chunama

Jour 13 : On traverse la Bothe Koshi, par le pont suspendu partiellement reconstruit après le séisme, ce qui nous évite un long détour et rejoignons Thuman. Là aussi la reconstruction avance bien même si la situation de nombreux habitants déjà pauvre avant le séisme reste précaire. Il y a beaucoup de vieux, de femmes et d'enfants mais la plupart des hommes dans la force de l'age sont partis travailler à Katmandou ou à l'étranger.

Jour 14 : Fin du trek, retour à Syabru et bilan extrêmement positif, tant du côté des voyageurs que du côté de l'équipe Langtangpa. Ce séjour leur à permis de travailler, de redevenir acteurs de leur vie tout en gagnant un salaire décent. Ils ont pu aussi revoir leur vallée sous un autre angle, celui du regard émerveillé des touristes, toujours fascinés par ses paysages et ses habitants, ce qui leur a redonné espoir. Et au delà, c'était aussi l'occasion pour eux de se retrouver entre amis, sur leur terre à partager de bons moments tous ensemble., dans une dynamique optimiste et positive.

 

A Katmandou, nous prolongeons le séjour en famille puisque nous sommes accueillis dans l'appartement où vit la famille de Sandu à Swayambu. Ahh les momos fait maison ! Nous avons aussi l'occasion de participer à une réunion du Langtang Committee consacrée justement à la reprise du tourisme. Nous pouvons y délivrer le message positif que nous retenons de notre trek: Certes le Langtang a été durement frappé et il faudra du temps à sa population pour se relever. En revanche, la vallée est ouverte aux touristes, le chemin ne présente pas de difficultés et il est toujours possible d'y passer de magnifiques séjours. Les langtangpas qui n'ont rien perdu de leur sens de l'hospitalité nous attendent. Bien sur ce voyage n'aurait pas été  aussi riche sans la présence de l'équipe Langtangpa. Il est impératif pour vraiment profiter de son voyage au Langtang et faire de belles rencontre de partir avec une équipe de la vallée.

Atelier momos avec Phu-Dolma à Katmandou
Atelier momos avec Phu-Dolma à Katmandou
réunion avec le comité
réunion avec le comité

L'objectif de ce séjour était double : d'une part permettre à un groupe de trekkeurs de vivre un beau voyage malgré les circonstances et d'autre part relancer au plus vite une activité touristique au Langtang, ce qui est crucial pour l'avenir de la vallée. J'ai la grande satisfaction de constater que cet objectif a été largement atteint, au delà même de mes espérances.

Les avis des autres voyageurs solidaire et des langtangpas ici: http://www.latraceduyak.fr/t%C3%A9moignages/

Vous aussi soutenez les Langtangpas et venez vivre un voyage inoubliable avec nous. Les infos sur les prochains séjours sont sur la page "pratique"

en ballade sous le Lirung
en ballade sous le Lirung
la descente du Tserko ri
la descente du Tserko ri
Gosaikund
Gosaikund
Une partie de l'équipe en Juillet 2015
Une partie de l'équipe en Juillet 2015
Helambu
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Naghtali
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Jeune maman Tamang
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Gur Karpu
Gur Karpu
Sandu à Kyanjin en 07/2015
Sandu à Kyanjin en 07/2015
Laurebina
Laurebina